« Un monde d’argent ».
Le difficile financement milanais
de la coûteuse paix de Fribourg (1516-1519)
Un des buts annoncés de la paix de Fribourg était de protéger le
duché de Milan redevenu français de toute nouvelle descente des
Suisses. Si leur potentiel belliqueux est effectivement neutralisé, le
roi le paie au prix fort : 1 million d’écus. Une somme colossale équivalant à près de deux ans de revenus ordinaires du Milanais. Mais
pourquoi les Français se sentent-ils redevables d’une pareille somme
à l’égard des Suisses ? Une brève description s’impose. Depuis le
siège de Dijon de 1513 (les Suisses abandonnent la cité conquise
moyennant promesse d’une forte compensation financière), la
monarchie demeure débitrice de 400'000 écus à leur égard. Puis,
au nom du traité de Genève consécutif aux opérations de l’été-automne 1515, le roi leur doit 300'000 écus, estimant que la victoire
des armées françaises devait être validée par l’or du royaume. Aussi,
dès avant la conclusion de la paix de Fribourg, les Suisses ont un
crédit de 700'000 écus auprès du Très Chrétien1. Enfin, parce que
les litiges de frontières (Locarno, Bellinzona et Lugano notamment)
pourraient être réglés à la faveur du roi, on attend de ce dernier qu’il
débourse 300'000 écus supplémentaires.
Un million d’écus, donc, au total. Si l’on voulait être parfaitement complet, il s’agirait aussi de préciser qu’annuellement, le
roi s’oblige à verser au moins 50'000 écus de pensions destinées à
sécuriser la position française auprès des élites cantonales et helvé1
Philippe Hamon, L’Argent du roi. Les Finances sous François Ier, Paris : Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 1994, p. 53.
229
Séverin D
tiques. Dès après le traité de Genève qu’il conclut avec seulement
sept cantons (7 décembre 1515), le roi honore une première tranche
de 200'000 écus, au moyen d’une taille de 100'000 ducats prélevée
dans le Milanais, le restant étant probablement versé par le roi et son
entourage2. Si l’on met de côté les 300'000 écus relatifs aux litiges
frontaliers renvoyés aux calendes grecques, les Français sont comptables immédiatement de 500'000 écus.
Conclu le 29 novembre 1516 et ratifié dès le 8 décembre suivant par le roi de France, le traité de Fribourg a pour effet de lisser
la somme en trois traites annuelles : 200'000 au 1er janvier 1517,
200'000 au 1er janvier 1518 et 100'000 au 1er janvier 1519, toutes
trois devant être versées à Berne par les agents du roi3. Afin de couvrir ces trois sorties extraordinaires de numéraire, il apparaît légitime
au pouvoir royal que les Lombards (communes, élites marchandes,
feudataires, artisans, peuple manouvrier, paysans, excepté le clergé
jouissant du privilège d’exemption) contribuent à l’effort financier.
De fait, si le royaume de France finance une bonne partie de la guerre
ultramontaine, les revenus de l’État de Milan sont largement dévolus
au financement de la grande politique italienne du roi de France4.
Parce qu’ils sont en première ligne, les Milanais doivent payer le
prix de leur sécurité. Arme décisive de la victoire et du maintien de
la paix, l’impôt peut mettre cependant en péril le fragile consensus
politique. À titre évocateur, en décembre 1515, les députés de la cité
de Crémone font savoir au roi qu’« à la nécessité royale s’opposait
l’impossibilité de la cité.»5 C’est précisément ce point de jonction
2
Archivio di Stato di Mantova (désormais ASMn), Archivio Gonzaga, Milano, b. 1641, fol. 252r.,
Suardino, envoyé de Francesco ii Gonzaga près le roi de France, à son maître, Pavie, 26 septembre 1515.
3
Catalogue des actes de François Ier (désormais CAF), Paris : Imprimerie nationale, 1887, t. 1, p. 96,
n° 565 (enregistrement à la Chambre des comptes de Paris, le 23 juillet 1523, d’après AN, P 2551,
fol. 286).
4
Hamon, L’Argent du roi (voir n. 1), p. 125 et 197.
5
Archivio di Stato di Cremona (désormais ASCr), Litterarum, ms. 2-bis, fol. 696, Gian Pietro Giberto
230
L F
antagoniste qui va représenter le fil conducteur de notre réflexion,
questionnant la place de la négociation et du consentement à l’impôt
dans l’établissement d’une domination pérenne, avec pour double
point limite : la tentation du passage en force du côté des Français et
l’attitude persistante des Milanais de résister à tout nouveau tribut.
Entre front commun des cités de l’État de Milan (août 1516 – début
1517), présence importante des feudataires et recours aux factions
guelfe et gibeline pour négocier (été 1517 – printemps 1518), et
risque de fronde urbaine des Milanais, auquel les Français répondent
par une violente impatience (août 1518 – printemps 1519 ), se dessine une cartographie fine des rapports de force complexes qui travaillent le Milanais français. Plus généralement, le financement de
la paix de Fribourg jette une lumière supplémentaire sur la violence
symbolique et physique que représente l’impôt royal, manifestant la
volonté non négociable d’un pouvoir supérieur en armes.
Le front commun des cités de l’État de Milan
(août 1516 – début 1517)
Afin d’apporter les premiers 200'000 écus à Berne le
er
1 janvier 1517, le pouvoir français doit recourir à une levée extraordinaire sur les feudataires, laquelle est annoncée aux Milanais
dès le mois d’août 15166. L’âpre refus de ces derniers contraint le
roi et son lieutenant en Milanais de temporiser. Il faut attendre le
22 novembre et l’imminence de la paix de Fribourg pour qu’un
nouvel ordre royal parvienne aux cités du duché de Milan de luy
donner et auctroyer pour une fois tant seullement la somme de deux
cent mille, et ce, pour le service au Roy et si vous amez le bien, seurté,
& Gian Giacobo Crotto, orateurs de la cité de Crémone près François ier, Milan, 3 décembre 1515
: ala necessita Regia se opponeva la impossibilita dela Cità.
6
ASMn, Archivio Gonzaga, Milano, b. 1642, fol. 296, Gian Angelo Vincemala à Francesco ii
Gonzaga, Milan, 11 août 1516.
231
Séverin D
repoz et tranquilité de tous voz femmes et enfans7. À titre d’exemple,
la seule cité de Crémone doit débourser 36'000 écus. Pour certains
contemporains Milanais, il s’agirait d’un mondo de danari8. S’il est
difficile d’évaluer les richesses thésaurisées des communes, ou même
leur capacité maximale de prélèvement sur les flux de marchandises
et les populations, il semble que le problème ne réside de toute façon
pas dans l’évaluation strictement quantitative du problème. L’affaire
se noue plutôt autour du consentement à l’impôt. La question n’est
pas tant de pouvoir ou non honorer la demande du roi, mais de
savoir si celle-ci est parfaitement légitime, si la transcendance supposée de l’ordre royal n’est pas une fiction à laquelle les Milanais
n’adhèrent pas. Dire « non » au roi, c’est inscrire dans le refus de la
stricte mise en arborescence du politique et défendre la multiplicité
des transcendances : « à la nécessité royale s’opposait l’impossibilité
de la cité. »9
En charge de l’affaire, le général des finances de Milan ne parvient pas non plus à emporter l’adhésion du gouverneur Odet de
Foix, vicomte de Lautrec, pour qui « il ne […] semble pas que ce
soit le moment », étant donné que la paix n’est même pas signée et
que « l’autre taille qui fut demandée par Sa Majesté n’a pas encore
été levée intégralement. »10 Du côté de Milan, une grande murmuratione commence à sourdre tandis que les principaux personnages
entreprennent de négocier, notamment le Milanais Gian Giacomo
Trivulzio, maréchal de France, afin d’obtenir une réduction de la
7
ASCr, Litterarum, ms. 2, fol. 200, Odet de Foix aux députés de la cité de Crémone, « Au camp »,
22 novembre 1516.
8
ASMn, Archivio Gonzaga, Milano, b. 1642, fol. 343 r.-v., Gian Angelo Vincemala à Francesco ii
Gonzaga, Milan, 20 novembre 1516.
9
ASCr, Litterarum, ms. 2-bis, fol. 696, Gian Petro Giberto & Gian Giacobo Crotto, orateurs de la
cité de Crémone près François ier, Milan, 3 décembre 1515 : ala necessita Regia se opponeva la impossibilita dela Cità.
10 Marino Sanudo, I Diarii, Nicolò Barozzi, Guglielmo Berchet, Federico Stefani (éd.), Venise :
Fratelli Visentini Tipografi Editori, 1879-1902, vol. 23, c. 153, Andrea Rosso, secrétaire de Venise, Milan, 2 novembre 1516, ce qu’il confirme en c. 315, Milan, 10 décembre 1516.
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L F
taille, voire même son annulation11. Ce dernier s’emploie à « exhorter et ordonner que chaque cité, avec son contado » commence les
prélèvements12. S’il est conscient du montant des sommes exigées,
Trivulzio concède aussi que « le roi était contraint de le faire […]
parce qu’il avait voulu passer cet accord avec les Suisses par tous les
moyens, ce qui lui coûte un monde d’argent [un mondo de danari]. »13 Afin de gagner du temps et faire porter à la collectivité la responsabilité d’une réponse négative au roi, les gentiluomini milanais
renvoient le problème au Consiglio generale de la cité de Milan14.
Du côté de Crémone, les manœuvres ont aussi commencé : plutôt que de payer la part qui leur revient (36'000 écus), les Crémonais
proposent de faire un don immédiat de 12'000 ducats15. Face à la
manœuvre captatrice du roi, du haut vers le bas (la taille extraordinaire), ils travaillent à inverser le mouvement du bas vers le haut (le
don gratuit).
Entre temps, à Fribourg, les ambassadeurs du roi ont conclu une
paix et amitié avec les treize cantons suisses. Dès le 28 novembre,
le roi fait savoir à Gian Giacomo Trivulzio comme le temps passe, et
s’approuche, de la grosse somme d’argent qu’il fault avoir pour le fait de
ladite paix et amytié qui seroit en danger de venir a rompture si faulte y
avoit audit argent. […]. A ceste cause en fault faire mestier et ny perdre
11 ASCr, Litterarum, ms. 2, fol. 320, Gian Maria Gaudentio aux députés de la cité de Crémone, Milan, 23 novembre 1516 ; Sanudo, I Diarii (voir n. 10), vol. 23, c. 192, Andrea Rosso, secrétaire
de Venise, Milan, 6 novembre 1516.
12 ASCr, Litterarum, ms. 2-bis, fol. 735-736, Gian Giacomo Trivulzio aux députés de la cité de Crémone, Milan, 19 novembre 1516.
13 ASMn, Archivio Gonzaga, Milano, b. 1642, fol. 343 r.-v., Gian Angelo Vincemala à Francesco ii
Gonzaga, Milan, 20 novembre 1516.
14 Sanudo, I Diarii (voir n. 10), vol. 23, c. 229, Andrea Rosso, secrétaire de Venise, Milan, 21 novembre 1516.
15 ASCr, Litterarum, ms. 2, fol. 322, Giacomo Ponzono, Stefano Sfondrato, Gian Francesco de Argenta, le comte Giorgio de Persico et Giorgio de Cambiago, députés de la Cité de Crémone, à
Gian Battista de Melo, orateur de celle-ci envoyé auprès d’Odet et Thomas de Foix, Crémone,
30 novembre 1516.
233
Séverin D
point de temps16. Au désir du roi s’oppose la résistance des Milanais :
« tous jusqu’à maintenant demeurent durs »17. Début décembre,
les cités de Pavie, Lodi, Alessandria, Parme et Plaisance rallient les
positions de Crémone et Milan. Leurs députés convergent vers la
capitale en vue d’établir un front commun18. Pour leur part, les
Crémonais invoquent les continuelles calamités qu’ils subisssent, au
point que, depuis l’arrivée des Français, « le monde est à l’envers [è
voltato el monde ala rovescia] ». Pour preuve, la cité serait « soumise
aux villages et aux vilains, lesquels sont plus respectés que les gentilshommes. »19
L’âpre position des Lombards est maintenue tout au long du mois
de décembre. Dix jours avant Noël, les députés de Crémone à Milan entrent de nouveau en contact avec Gian Giacomo Trivulzio et
Cesare Birago, un autre noble Milanais francophile. Reçus chez lui,
ils le prient qu’il « daigne écrire au commissaire [des taxes], ou son
lieutenant, qu’il veuille bien ne pas aggraver ni contraindre au paiement chacun des districts crémonais. »20 Le même jour, les Milanais
élisent deux orateurs destinés à porter leurs doléances au roi21. Entre
louvoiement, négociation et gain de temps, les Crémonais résistent
également, et maintiennent leur proposition de faire oblatione de
16 Catalogue de vente de documents relatifs au président du Parlement Jean de Selve, pièce n° 13, p. 15,
François er à Jean de Selve, vice-chancelier de Milan, Amboise, 28 novembre 1516 [en ligne :
http://drouotstatic.zonesecure.org/pdf/Demaigret/lettres/15052013/Demaigret-15052013-BD.
pdf?id=16346&cp=90].
17 ASCr, Litterarum, ms. 2, fol. 302, Gian Maria Gaudentio aux députés de la cité de Crémone, Milan, 2 décembre 1516.
18 ASCr, Litterarum, ms. 2-bis, fol. 591, Adendum à l’instruction des députés de Crémone adressée à
ses orateurs envoyés à Milan, Crémone, [vers le 3 décembre 1516] ; S, I Diarii (voir n. 10),
vol. 23, c. 284, Andrea Rosso, secrétaire de Venise, Milan, 3 décembre 1516.
19 ASCr, Litterarum, ms. 2-bis, fol. 590, instructions des députés de la cité de Crémone à ses orateurs
près le gouverneur de Milan, Crémone, 3 décembre 1516.
20 ASCr, Litterarum, ms. 2-bis, fol. 106-107, Leone Picenardi et Andrea de S[...]o, orateurs de la
cité de Crémone, aux députés de Crémone, Milan, 15 décembre 1516.
21 ASCr, Litterarum ms. 2-bis (voir n. 20).
234
L F
12'000 ducats aux agents du roi à Milan comme dono gratis & amore
au roi. Quant à la somme rémanente, ils osent invoquer la dette
d’une certaine somme de 6'000 ducats que le roi conserve à l’endroit
de leur cité22.
Face à la fronde des cités lombardes, François er aurait reconnu
avoir « promis une chose impossible » aux Suisses, « mais il faudra
faire ce que l’on pourra ». Aussi insiste-t-il pour « être obéi et [que
Lautrec] fasse que [les sommes] soient prélevées. »23 S’impatientant,
il rappelle avoir par trois fois donné ordre qu’il fut trouvé et envoyé
promptement a Genefve la somme de cinquante mil escuz soleils pour
le fait des Suisses24. Force est de constater que le roi ne parle plus
de 200'000 écus, mais de seulement 50'000 ducats25. La résistance
des cités semble avoir payé. Afin d’éviter la rupture, les Lombards
ont probablement avancé cette somme, laissant le reste à la charge
du royaume. C’est ainsi que, finalement, à Berne, le 23 mars 1517,
avec deux mois de retard, les Suisses peuvent passer quittance de la
somme de 200'000 écus auprès d’André Le Roy, ambassadeur du
Très Chrétien26. Après une première traite ayant donné lieu à un
front commun des cités, les négociations de la deuxième traite nous
permettent de plonger dans le champ de forces de la cité de Milan,
et d’apprécier en nuance les rapports de force autochtones que révèle
l’ordre royal.
22 ASCr, Litterarum, ms. 2, fol. 202, Ottaviano Crotti et Gaspare de Marino, consiliari de la cité de
Milan, à Odet de Foix, Crémone, 27 décembre 1516.
23 Sanudo, I Diarii (voir n. 10), vol. 23, c. 325, François ier à Odet de Foix, vicomte de Lautrec, Amboise, 8 décembre 1516.
24 Catalogue de vente de documents relatifs au président du Parlement Jean de Selve (voir n. 16), pièce
n° 14, p. 15, François ier à Jean de Selve, vice-chancelier de Milan, Amboise, 12 décembre [1516],
en ligne.
25 ASCr, Litterarum (voir n. 24).
26 Édouard Rott, Histoire de la représentation diplomatique de la France auprès des cantons suisses, de
leurs alliés et de leurs confédérés, vol. 1, Berne ; Paris : Benteli ; Alcan, 1900, p. 225, n. 4.
235
Séverin D
Feudataires, factions et négociations (été 1517 – printemps 1518)
Dès le mois de juin 1517, afin de ne pas réitérer le retard de
la première traite, François ier signale aux Milanais la nécessité de
s’acquitter d’un deuxième versement pour la Noël prochaine. La
somme imputée porterait sur la moitié des 200'000 écus que le roi
doit à nouveau aux Suisses, auxquels il doit par ailleurs 57'000 écus
de pensions27. Fin juillet, les sources commencent à diverger : tantôt
se préparerait un taglione de 100'000 ducats, commun entre Milan
et Gênes28 ; tantôt 150'000 pour Milan et 10'000 pour Gênes29.
Finalement, le roi clarifie ses attentes. Depuis Rouen, le 19 août, il
fait savoir à son chancelier de Milan, Jean de Selve, que ce sont bien
100'000 écus qui doivent être levés outremont. À ses sujets, deux
possibilités sont offertes : soit un taillon, c’est-à-dire un impôt direct
extraordinaire per capita, soit croistre et charger les daces et sel, autrement dit une augmentation temporaire des péages et de la gabelle30.
Sur place, la première hypothèse semble l’emporter, de peur probablement que les droits augmentés ne soient jamais réduits31.
Début septembre 1517, François ier confirme son ordre de juin
à Gian Giacomo Trivulzio de procéder à la levée de 100'000 écus,
mais persévère, par nécessité tactique, dans le double prélèvement :
pour moitié via une augmentation des droits et pour une autre, en
déléguant au puissant milanais Galeazzo Visconti la tâche de trouver
27 Sanudo, I Diarii (voir n. 10), vol. 24, c. 396, Gian Giacomo Caroldo, secrétaire vénitien près le
gouverneur de Milan, Milan, 18 juin 1517.
28 ASMn, Archivio Gonzaga, Milano, b. 1643, fol. 189r., Raffaelo Gusperto à Francesco ii Gonzaga,
Milan, 12 juillet 1517.
29 ASMn, Archivio Gonzaga (voir n. 28), fol. 209r., Raffaelo Gusperto à Francesco ii Gonzaga, Milan, 26 juillet 1517.
30 Catalogue de vente de documents relatifs au président du Parlement Jean de Selve (voir n. 16), pièce
n° 16, p. 16, François ier à Jean de Selve, vice-chancelier de Milan, Rouen, 19 août 1517, en ligne.
31 ASMn, Archivio Gonzaga, Milano, b. 1643, fol. 189r., 209r. et 320r., Raffaelo Gusperto à Francesco ii Gonzaga, Milan, 12, 26 juillet et 18 octobre 1517.
236
L F
ces sommes32. Ce faisant, dès le mois suivant, ce dernier commence à
s’affairer, hésitant cependant entre le prêt, l’augmentation des droits
de douane intérieurs, une annate des donataires et exemptés, ou encore un prêt de la part des feudataires33. Début décembre, alors que
l’échéance de versement s’approche, les modalités sont encore indéterminées tandis que les « Milanais ont envoyé trois orateurs auprès
de Lautrec [gouverneur de Milan]. »34 Alors que les Bernois auraient
dû recevoir les 200'000 écus le 1er janvier 1518 pour le compte des
cantons, on évoque en janvier et février une possible annate sur les
feudataires, légataires et exemptés, un prêt des gentilhomini et merchadanti, un taglione général à toutes les cités et terres de l’État de
Milan ou encore une taxe sur les canaux d’irrigation35. En France,
le roi semble avoir tranché en faveur d’une annate d’un peu plus de
100'000 écus, c’est du moins ce que l’estat de finances prévisionnel de
1518 semble indiquer. En cas de résistance, qu’elle soit levée en sadicte
duché par forme de subvention36.
Dès le 15 janvier, le roi de France exige « l’annate sur tous les
feudataires, donataires et exemptés » ainsi qu’un « prêt par les gentilhomini et merchadanti réputés avoir de l’argent. »37 Les deux premiers mois de l’année 1518 sont l’occasion de négociations extrêmement âpres entre Lautrec, gouverneur de Milan, et les principaux
32 Sanudo, I Diarii (voir n. 10), vol. 24, c. 631, Gian Giacomo Caroldo, secrétaire vénitien près le
gouverneur de Milan, Milan, 30 août 1517.
33 ASMn, Archivio Gonzaga, Milano, b. 1643, fol. 320r., Raffaelo Gusperto à Francesco ii Gonzaga,
Milan, 18 octobre 1517.
34 Sanudo, I Diarii (voir n. 10), vol. 25, c. 136, Gian Giacomo Caroldo, secrétaire vénitien près le
gouverneur de Milan, Milan, vers le 14 décembre 1517.
35 ASMn, Archivio Gonzaga, Milano, b. 1644, fol. 9v., 25r., 29r., et 42r.-v., Raffaelo Gusperto à
Francesco ii Gonzaga, Milan, 15 janvier, 2, 7 et 9 février 1518.
36 Matteo Di Tullio, Luca Fois, Stati di Guerra. I bilanci della Lombardia francese nel primo Cinquecento, Rome : Presses de l’École française de Rome, 2014, p. 236.
37 ASMn, Archivio Gonzaga, Milano, b. 1644, f. 9v., Raffaelo Gusperto à Francesco ii Gonzaga, Milan, le 15 janvier 1518.
237
Séverin D
capi [chefs] milanais. Depuis la Suisse, Etienne Fauchet, Pierre Le
Mansec, Alexandre de Saint-Gelais, sieur de Lansac, et Denis Poillot, envoyés du roi et chargés de fournir les 200'000 ducats au Corps
helvétique, sont dans l’impossibilité d’accomplir leur mission38. Afin
d’accélérer le processus et surtout reprendre la main, les Français
n’hésitent pas à procéder à l’arrestation de certains riches Milanais,
tandis que d’autres voient la soldatesque faire irruption chez eux
afin de les inciter à contribuer à l’effort financier le moment venu.
Pris au dépourvu par la somme des refus, les Français envisageraient
toujours un taglione général sur toutes les cités et terres de l’État
de Milan39. Depuis Amboise, le 20 janvier 1518, une ordonnance
royale est promulguée et tranche : elle touche la levée d’une annate
en Milanais. Un délai réduit à quinze jours est donné aux feudatariis,
exemptis, donatariis et alii afin de porter leurs iura et privilegia devant le commissaire à l’annate, de même que quiconque jouissant de
terres irriguées par des eaux publiques40. Rappelons que par annate
sur les feudataires, on entend alors le versement des entrées fiscales
annuelles d’un fief de la part de son détenteur délégué (le vassal) en
direction de son maître en dernière instance (le suzerain). En 1518,
par-delà la question du financement de la paix suisse, il s’agit aussi
pour le roi de France qu’il soit bien le faîte de la pyramide féodale
lombarde. Dès le 2 février, le gouverneur Lautrec rend publique
l’ordonnance41. D’après l’ambassadeur du marquis de Mantoue en
mission à Milan, il va sans dire que « tous les feudatarii et gentilhomini de cet Etat s’en ressentent, disant que jamais aucun seigneur de
Milan ne fit telle demande ». Pour interjeter appel contre ce qu’elle
38 CAF (voir n. 3), t. 9, p. 76 ; Edouard Rott, Histoire de la représentation (voir n. 26), t. 1, p. 228.
39 ASMn, Archivio Gonzaga, Milano, b. 1644, fol. 9v., Raffaelo Gusperto à Francesco ii Gonzaga,
Milan, 15 janvier 1518.
40 Ordonnances des rois de France, Paris : Imprimerie nationale, 1902, t. 1, p. 189-190, ordonnance
touchant la levée de l’annate dans le Milanais, Amboise, 20 janvier 1518.
41 ASMn, Archivio Gonzaga, Milano, b. 1644, fol. 25r., Raffaelo Gusperto, ambassadeur de Francesco ii Gonzaga, à ce dernier, Milan, 2 février 1518.
238
L F
considère comme une sentence inique et afin de porter leur cause
devant Lautrec, l’aristocratie féodale a élu les sénateurs Ambrogio da
Fiorenza et Gian Angelo Selvatico, ainsi que Tomaso da Landriano.
Accompagnés d’un grand nombre de gentilshommes, ils s’en sont allés chez Lautrec. « Sans aucun respect ni crainte », Gian Stefano Castiglione aurait exprimé le sentiment général : « en ne modérant pas
cette [demande], [ce serait] rendre ennemi de la Majesté Très Chrétienne tous les gentilhomini »42. Revenus le lendemain, ils obtiennent
une suspension, en attendant qu’ils écrivent au roi43. L’affaire devient
définitivement une affaire d’État.
Le 15 février suivant, en la grand’chambre du Sénat de Milan,
un conseil présidé par le gouverneur Lautrec doit se tenir devant le
vice-chancelier Jean de Selve, le général des finances Sébastien Ferrier, le secrétaire du gouverneur Tarbes et le premier secrétaire du
Sénat Giulio Cattaneo. Face à eux, les deux grands groupes de pouvoir politico-clientélaires du Milanais, les factions gibeline et guelfe
sont représentées, d’une part par le cavaliere Alfonso Visconti, « avec
grande suite de gentilhomini » et, d’autre part, par Pietro Trivulzio,
abbé commendataire de Sant’Antonio, « avec une autre grande suite
de gentilhomini ». Leur objectif est de « modérer cette annate » au
tiers des entrées fiscales qu’ils perçoivent dans leurs fiefs. Sans détours, le gouverneur leur fait savoir qu’ils ne devraient pas perdre
leur temps puisqu’un décret prévoit déjà son application. Il n’y aura
aucune exemption. Déjà s’organise un tribunal sous la présidence du
vice-chancelier, assisté du général des finances, du maître des entrées,
et de Jean de la Rochelle, député à la révision des privilèges et liquidations des annates.
Guelfes et gibelins font alors front. D’un côté, le guelfe Gian
Giacomo Trivulzio, un des plus puissants Milanais de son temps,
aurait refusé de payer l’annate arguant de son manque d’argent. Son
42 ASMn, Archivio Gonzaga Milano, b. 1644, fol. 29r., Milan, 7 février 1518.
43 ASMn, Archivio Gonzaga Milano, b. 1644), fol. 42r.-v., Milan, 9 février 1518.
239
Séverin D
proche parent Antonio Trivulzio, évêque d’Asti, aurait opposé un
même refus. En se tournant en direction des gibelins, notamment
le cavaliere Alfonso Visconti, Lautrec est confronté à une résistance
plus ouverte au compromis : Visconti voudrait payer le tiers de la
somme attendue ou, à l’extrême justesse, la moitié. Négociant avec
Galeazzo Sanseverino, une autre figure gibeline de relief, alors grand
écuyer de France, Visconti en profite pour se poser en intermédiaire
indispensable entre le pouvoir royal, la cour, son lieutenant en Milanais et « cette noblesse qui le courtise comme un grand capellazo. »44
Quelque temps plus tôt, ce rôle était encore dévolu à son rival Gian
Giacomo Trivulzio, lequel confirme par l’expression de son veto son
retrait grandissant. Celui-ci sera formalisé par sa disgrâce à l’automne
suivant et sa mort à Chartres le 4 décembre 1518.
Finalement, à la mi-février 1518, Lautrec trouve une voie
moyenne en acceptant que les feudataires paient un tiers immédiatement et un deuxième tiers plus tard45. Le cavaliere Alfonso Visconti se dit prêt à payer, sachant que Trivulzio avait refusé tout net.
Lautrec apprécie et lui aurait dit : « Vous, vous êtes un homme de
bien »46. En un temps où les appartenances identitaires entre tradition factionnaire et service du prince sont de plus en plus composites
et indistinctes, l’idiome de la faction demeure toutefois un moyen
de rassembler les Milanais et de négocier avec eux via les chefs de
faction. À l’issue des tractations, le cavaliere Visconti aurait dit à
l’ambassadeur de Mantoue que Pietro Trivulzio, abbé commendataire de sant’Antonio, et Bernabò Visconti « s’étaient fait cappi, l’un
de la partie gibeline et l’autre de la partie guelfe. » Toutefois, c’est
bien Alfonso Visconti qui a obtenu la résolution de l’affaire47. Il sort
renforcé par la négociation : s’il s’est lui-même réduit à obéissance, il
44 ASMn, Archivio Gonzaga Milano, b. 1644, fol. 45r., Milan, 17 février 1518.
45 ASMn, Archivio Gonzaga Milano, b. 1644, fol. 54r., Milan, 24 février 1518.
46 ASMn, Archivio Gonzaga Milano, b. 1644, fol. 45v., Milan, 17 février 1518.
47 ASMn, Archivio Gonzaga Milano, b. 1644, fol. 56v., Milan, 28 février 1518.
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a intégré les circuits de la négociation, donc il a acquis de l’influence,
tandis que les Trivulzio ont été épargnés mais marginalisés. En définitive, avec deux mois de retard au moins, force est de constater que
Lambert Meigret, trésorier du roi en charge du règlement de la composition generalle des Suisses, peut finalement exécuter le versement à
Berne de l’annate complétée par la somme de 60'000 écus au soleil
[…] [reçeu] par cedict tresorier par les daciers et gabelliers et honorer la
part milanaise de la deuxième traite de la paix de Fribourg48.
Fronde urbaine milanaise et violente impatience française (août
1518 – printemps 1519)
En raison du retard du paiement de la deuxième puis de la
nécessité suivante d’honorer la troisième et dernière traite avant
le 1er janvier 1519 (cette fois-ci seulement 100'000 écus au total),
Lautrec convoque dès le 17 août 1518 un certain nombre de
gentilshommes, marchands et docteurs milanais. Après leur avoir
rappelé combien « il aimait cette cité [de Milan] », il exige qu’ils
trouvent et/ou fournissent 70'000 ducats en vertu du traité de
Fribourg. Les Milanais réclament quatre jours de délai pour rendre
leur décision49. Puis, les sources entrent en silence, et il faut attendre
le mois de décembre 1518 pour se rendre compte, une nouvelle fois,
de l’âpreté des négociations entre le gouverneur royal et les élites
locales. Grâce au Vénitien Caroldo, on apprend qu’à la fin du mois
d’août, les Français auraient obtenu déjà 30'000 ducats50, ce qu’à la
mi-décembre le Mantouan Gusperto infirme : Lautrec serait encore
en peine d’obtenir les 100'000 scudi du duché de Milan à destina-
48 Di Tullio, Fois, Stati di Guerra (voir n. 36), p. 238.
49 ASMn, Archivio Gonzaga, Milano, b. 1644, fol. 205r.-v., Raffaelo Gusperto à Francesco ii Gonzaga,
Milan, 17 août 1518.
50 Sanudo, I Diarii (voir n. 10), vol. 25, c. 612, Gian Giacomo Caroldo, secrétaire vénitien près le
gouverneur de Milan, Milan, vers le 24 août 1518.
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tion des Suisses51. Encore une fois, les Français ne parviennent pas
à honorer à temps leur engagement avec les cantons. Au matin du
16 décembre, Lautrec proclame à nouveau la nécessité royale d’obtenir 100'000 écus de ses sujets milanais. Le gouverneur de Milan
aurait espoir d’en obtenir 30'000 lors de la foire de Lyon afin de
réduire la charge de la cité de Milan à 70'000 ducats52.
Quelques jours avant la Noël 1518, le gouverneur de Milan essuie un dramatique refus des Dodici di Provvisione, l’organe de commandement de la cité qui, « ensemble avec un grand nombre de gentilhomini et mercadanti de cette cité, tinrent un grand conseil pour
ne pas payer ce taillon demandé et ils délibérèrent de ne vouloir
payer un sou. » Surtout, les « marchands de drap, soie et de laine »
menacent de faire fermer les boutiques aux artisans de Milan, sousentendu suffisamment explicite d’une possible révolte à venir53. De
fait, dès le lendemain, les Français se voient opposer porte close devant nombre de boutiques. Pris de colère – se turbo molto –, Lautrec
ordonne l’identification des trois « premiers marchands de laine »,
leur prise de corps et leur mise sous les verrous dans sa résidence.
Leurs confrères marchands, mais aussi les nobles et les artisans, se
réunissent immédiatement dans le monastère voisin de Santa Maria
Maggiore pour obtenir leur libération. Dans la cité, la rumore se fait
grande tandis qu’une audience est demandée au gouverneur54. Lautrec n’hésite pas : il ordonne la mise en barricade de sa résidence et
procède à l’armement de sa garde. Il faut l’intervention d’un sextuor
bi-factionnaire pour enclencher la décrue de la tension : les juristes
Girolamo Castiglione et Ambrogio da Fiorenza « tous deux de faction [guelfe] », ainsi que Pietro da Novate et Bernardino da Busto,
51 ASMn, Archivio Gonzaga, Milano, b. 1644, fol. 251r., Raffaelo Gusperto, ambassadeur de Francesco ii Gonzaga, à ce dernier, Milan, 9 octobre 1518.
52 Archivio Gonzaga, Milano, b. 1644, fol. 307r., Milan, 16 décembre 1518.
53 Archivio Gonzaga, Milano, b. 1644, b. 1644, fol. 312v., Milan, 24 décembre 1518.
54 Archivio Gonzaga, Milano, b. 1644.
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« tous deux docteurs de l’autre faction [gibeline] », et du côté de la
noblesse d’épée, toujours en respectant la parité factionaire, les cavalieri Alfonso Visconti pour les gibelins, et Giacomo Trivulzio pour
les guelfes, se présentent devant Lautrec. Afin d’obtenir la libération
des marchands, le sextuor propose un don gratuit de 12'000 ducats,
un prêt à intérêt de 15'000 ducats et environ 30'000 autres ducats
sous une autre forme55.
Enfin, pour résoudre le conflit qui menace d’enflammer la cité, il
faut l’intervention décisive de Teodoro Trivulzio, maréchal de France,
chef de la Casa Trivulzia depuis la mort de Gian Giacomo, homme
capable de réunir sous ses ailes les deux factions et surtout un des
rares Lombards estimé par Lautrec56. Ce dernier ordonne la convocation de son conseil « sans aucun Italien, à l’exception dudit seigneur
Théodore », lequel obtient la libération prochaine des marchands.
Mais Lautrec tient à menacer les récalcitrants de pendaison et d’une
mise à sac de la cité si les élites usent du popolo pour faire pression
sur lui. À ce point, « chaque homme en est choqué », au point que la
pression finit par se relâcher. Cela fait dire à l’ambassadeur de Mantoue que Lautrec est « très prudent et sait très bien gouverner », laissant ensuite aux juristes Castiglione et Fiorenza le soin de « tir[er] la
barque vers la rive, [si bien] que son Excellence [Lautrec] obtiendra
combien il désirera. »57 Finalement, aux alentours du 7 janvier 1519,
Lautrec « dans ces fêtes, a été content d’ordonner la libération de ces
gentilhomini et merchadanti qui étaient détenus ». Élargis, ils auraient
promis 77'000 ducats « à payer par les merchadanti de piaza, par
ceux de la soie, ceux de la laine et ceux du fustagno [coton et lin]. »
On ne sait encore s’il s’agira d’une subventione, d’une donatione ou
55 « Relazione di Gian Iacopo Caroldo (1515-1520) », dans Relazioni degli ambasciadori veneti al Senato, A. Segarizzi (éd.), Bari : Laterza, 1913, vol. 2, p. 21.
56 Relazioni degli ambasciadori (voir n. 55).
57 ASMn, Archivio Gonzaga, Milano, b. 1644, fol. 312r.-313r., Raffaelo Gusperto à Francesco ii
Gonzaga, Milan, 24 décembre 1518.
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d’un prestito58. Quant au reste, Lautrec a probablement contracté,
pour le compte de la monarchie, un emprunt sur la place de Lyon.
Au printemps 1519, les exigences financières de la paix de Fribourg sont en passe d’être complètement honorées par le roi de
France. Pour la monarchie française, un nouveau grand défi commence : l’élection impériale de François ier, nouvelle occasion de tester le lien entre exigences financières de la politique internationale,
impôts extraordinaires et consensus socio-politique. Mais cette foisci, les Milanais ne sont pas sollicités, le seul royaume de France étant
mis à contribution.
Épilogue
Deux ans plus tard, au début du mois de mai 1521, François ier
(défait par Charles Quint lors de l’élection de 1519) obtient le renouvellement des accords de Fribourg cette fois-ci à Lucerne. « Paix,
alliance, ligue, union et confédération perpétuelle » sont confirmées
tandis que des troupes sont promises au roi59. Afin de couvrir une
partie de l’accord, le roi exige de Lautrec qu’il lui fasse remonter
160'000 écus, tandis que les Milanais louvoient pour ne pas payer
cette nouvelle taille extraordinaire60. L’extrêmité est telle qu’en 1521,
face à des forces césaro-pontificales financées par les banquiers liés
aux Habsbourg, aux Médicis et aux Sforza, François ier est tenté un
moment, pour payer les Suisses, de leur fournir des otages et des
cités lombardes en gage61. Confronté à un nouveau front des élites
58 ASMn, Archivio Gonzaga, Milano, b. 1644, b. 1645, fol. 253r., Milan, 7 janvier 1519.
59 ORF (voir n. 39), t. iii, p. 21-28 ; Archivio di Stato di Milano, Registro Panigarola, Libri Statutorum, reg. 16, fol. 37r.-v., Odet de Foix, vicomte de Lautrec, Milan, 11 mai 1521.
60 ASMn, Archivio Gonzaga, Milano, b. 1647, fol. 217r. et 228r., Francesco Grossino à Federico
Gonzaga, Milan, 27 mai et 9 juin 1521 ; Bibliothèque nationale de France (désormais BnF), ms.
fr. 2992, fol. 6, Thomas de Foix, gouverneur de Milan in absentia de son frère, à François ier, Milan, 2 juin 1521, ; Sanudo, I Diarii (voir n. 10), vol. 30, c. 291, [Alvise Marin, secrétaire], Milan, [fin mai 1521] ; c. 298, 299 et 325, Alvise Marin, secrétaire de Venise, Milan, 27, 28 et
30 mai 1521.
61 BnF, ms. fr. 2978, fol. 30, Louise de Savoie à Florimond Robertet, Compiègne, 8 novembre 1521.
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lombardes, Lautrec, toujours gouverneur de Milan, est contraint de
se reposer sur la seule générosité de ses amys et parens, bourse par
bourse62. Un des maux de la domination française outremont vient
d’offrir le spectacle de sa récurrence : le non-consentement à l’impôt
extraordinaire de la part des Milanais. Finalement, à la fin du mois
de novembre, l’infortuné gouverneur est contraint d’abandonner de
nuit la cité de Milan et de se replier vers la frontière nord. Par làmême, il met en suspens la précaire domination française de l’autre
côté des Alpes, que la paix de Fribourg avait tenté de pérenniser.
Séverin Duc
École française de Rome
Centre Roland-Mousnier, Université Paris-Sorbonne
62 BnF, ms. fr. 2992, fol. 43, Odet de Foix à François ier, Pizzighettone, 19 août 1521.
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